Joyeux PLF !

Valse des chiffres, ascen­sion des pla­fonds, parades ora­toires et rôles savam­ment dis­tribués…

Ain­si s’ouvre, pour les quinze jours à venir, le théâtre par­lemen­taire où les séna­teurs, jour après jour, par­fois jusqu’aux dernières heures de la nuit, s’emploient à mod­el­er le pro­jet de loi de finances. Cet exer­ci­ce, exigeant et sou­vent ingrat, déter­mine pour­tant le pro­fil d’une année budgé­taire : il peut l’éclairer, comme il peut la com­pro­met­tre.

Les députés ayant rejeté le texte qu’ils avaient eux-mêmes façon­né, nous nous sommes sai­sis de la ver­sion gou­verne­men­tale avec ce mélange de méth­ode et de rigueur qui s’impose. L’inflation des amende­ments ne manque pas — tra­vers bien humain — mais nous nous efforçons de main­tenir le déficit à 4,7%. Comme pour la réforme des retraites, pierre angu­laire du pro­jet de loi de finance­ment de la sécu­rité sociale, les analy­ses con­cor­dent : rap­ports, tra­jec­toires budgé­taires, exem­ples européens… tout invite à dis­siper cette fic­tion si française selon laque­lle nous pour­rions tra­vailler moins, enfan­ter moins, vivre plus longtemps et, par un heureux mir­a­cle, équili­br­er pour­tant nos retraites.

Si les séna­teurs s’astreignent à ce patient tra­vail d’argumentation, c’est qu’ils se savent déposi­taires d’une respon­s­abil­ité lourde : vot­er un bud­get pour la nation. Pour­tant, le retour du texte à l’Assemblée nationale risque fort de ressem­bler à la pre­mière lec­ture — heurtée, tumultueuse. Il n’est pas impos­si­ble que nous glis­sions, une fois encore, vers ce scé­nario devenu presque rit­uel : une loi spé­ciale et/ou un 49.3. Ce même 49.3 que le Pre­mier min­istre avait juré d’écarter, et dont le mur­mure, déjà, court sur les bancs de la gauche, soucieuse de préserv­er son image… Une con­fu­sion regret­table, qui frap­pera sans doute de plein fou­et la France laborieuse.

À cela s’ajoute un cli­mat nation­al où un sim­ple effet d’annonce suf­fit à entraîn­er l’opinion, ajoutant un voile d’inquiétude à une atmo­sphère déjà pesante. Les paroles du Chef d’état-major des armées — « accepter de per­dre ses enfants » et « souf­frir économique­ment » — n’ont pas jail­li au hasard : elles por­tent la mar­que de la réflex­ion stratégique, et prob­a­ble­ment l’aval prési­den­tiel. Notre préfète, d’ailleurs, le dis­tille dans cha­cune de ses inter­ven­tions auprès des Maires. Avec un peu de recul, on devine la toile de fond : l’esquisse d’un con­flit hybride, déjà latent. La France ne sera sans doute pas le théâtre d’opérations, et nos enfants ne tomberont pas sur un champ de bataille. Mais si l’OTAN demeure une cible, nous devons être prêts à répon­dre avec un arse­nal à la hau­teur de celui de nos adver­saires. N’oublions pas pour autant que la peur demeure l’arme la plus red­outable pour asservir un peu­ple… Hugues Saury, mieux que quiconque, saura appro­fondir ce sujet en temps voulu.

Et tan­dis que nos cam­pagnes se débat­tent entre radars enguir­landés et réal­ités que l’on préfère taire, c’est toute une fil­ière qui nous rap­pelle, avec la force tran­quille de ceux qui tra­vail­lent la terre, que der­rière les impor­ta­tions galopantes se joue la sou­veraineté silen­cieuse de nos assi­ettes.

En atten­dant, à l’image du Con­grès des maires, nous restons fidèles à ce qui con­stitue la sève même de notre pays : une sin­gulière capac­ité à se relever, à con­serv­er le cap avec lucid­ité, comme savent si bien le faire les élus locaux dont l’élégance du geste n’a d’égale que l’efficacité de l’action. C’est dans cet esprit que s’inscrit la totale sol­i­dar­ité des élus de la Métro­pole, la Région et l’Etat afin de sauver le savoir-faire de l’entreprise Brandt avec la con­vic­tion que ce fleu­ron indus­triel doit rester au cœur de notre ter­ri­toire.

Alors en ces pre­miers jours de l’Avent, si nous ne croyons guère aux mir­a­cles, préser­vons au moins la douce lumière de l’espérance.

« Noël est une sai­son non seule­ment de réjouis­sance, mais de réflex­ion. » — Win­ston Churchill

Pauline MARTIN

2 décem­bre 2025