L’engagement : De la Cité au champ de bataille.
L’engagement, valeur cardinale de toute société démocratique, était le thème de l’Assemblée générale des maires du Loiret qui s’est tenue à Gien samedi 15 mars. Qu’il s’agisse de la gestion d’une commune, de la conduite d’une entreprise ou de la défense du territoire, il suppose une conviction, un dévouement, et une volonté au service de l’intérêt général. Aujourd’hui, alors que l’Europe est secouée par des tensions croissantes, cet engagement prend une résonance particulière, notamment à travers les mandats des élus locaux.
Être élu local n’a jamais été un exercice de tout repos. Ces femmes et ces hommes, maires d’une petite commune ou d’une plus grande, conseillers départementaux ou régionaux, se retrouvent en première ligne face aux défis du quotidien : sécurité, éducation, logement, transition écologique… Leur engagement dépasse le cadre administratif pour s’incarner dans un lien de proximité avec les habitants, qui les sollicitent à tout moment.
C’est aussi pour cela que cet engagement est de plus en plus éprouvant. Les attentes citoyennes de plus en plus nombreuses, la défiance envers les institutions et la montée des incivilités fragilisent leur mission. Les menaces, voire les agressions physiques à leur encontre, se multiplient. En 2023, plus de 2 200 élus ont été victimes d’attaques verbales ou physiques en France, un chiffre qui est en constante augmentation. À cela s’ajoute une charge de travail considérable et des moyens parfois dérisoires, conduisant certains à jeter l’éponge. Ainsi, c’est plus de 20 maires qui, dans le Loiret, ont démissionné depuis le début du mandat. Un triste record !
Mais, malgré ces difficultés, l’engagement politique local reste essentiel. Il incarne la démocratie à l’échelle la plus concrète, celle de la vie des citoyens. Il permet aussi d’organiser une forme de résilience face aux crises, qu’elles soient économiques, sanitaires ou sécuritaires. Or, cette résilience est aujourd’hui mise à l’épreuve par un autre type de menace, bien plus insidieux : la guerre qui couve aux portes de l’Europe.
Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, l’Europe a redécouvert une réalité qu’elle pensait révolue : celle de la guerre conventionnelle sur son territoire. Ce conflit, loin de la campagne éclair annoncée, s’est transformé en un affrontement de long terme, où les positions se figent mais où les risques d’escalade demeurent bien réels.
En France comme ailleurs, les armées connaissent un regain d’intérêt, notamment parmi les jeunes, conscients que la paix n’est jamais acquise. Malheureusement, l’actualité démontre que l’engagement militaire redevient un enjeu de souveraineté nationale. Le projet de réarmement européen, longtemps freiné par des considérations politiques et budgétaires, est désormais une priorité stratégique. Mais si la force militaire classique demeure cruciale, un autre champ de bataille s’impose progressivement : le cyberespace.
Dans ce conflit aux ramifications multiples, la Russie ne se contente pas d’attaquer l’Ukraine par les armes. Elle mène également une guerre hybride, où les cyberattaques jouent un rôle central. Les services de renseignement occidentaux pointent régulièrement du doigt des officines russes responsables d’attaques informatiques contre des infrastructures critiques en Europe : hôpitaux, administrations, banques… L’objectif ? Désarmer l’adversaire sans coup de feu, en paralysant ses institutions et en manipulant les opinions.
La France, comme ses voisins, est fortement exposée à cette menace. En 2023, plusieurs collectivités locales, dont le Conseil départemental du Loiret, ont été victimes de cyberattaques de grande ampleur, perturbant la gestion du quotidien et exposant des données sensibles. Ces attaques ne sont pas anodines : elles participent d’une stratégie globale visant à fragiliser les démocraties occidentales.
Dans ce contexte, l’engagement prend une autre forme : celui des experts en cybersécurité et des militaires spécialisés dans la lutte informatique. La guerre de demain ne se livrera pas uniquement sur des champs de bataille classiques, mais aussi sur des serveurs informatiques et des réseaux numériques. Les élus auront leur part à y prendre en renforçant la protection des données selon des modalités nouvelles et avec des formations adaptées.
Face à ces défis, l’Europe doit réaffirmer l’importance de l’engagement sous toutes ses formes. Les élus locaux, en dépit des difficultés, sont le ciment de la démocratie. Les militaires, qu’ils soient sur le terrain ou derrière un écran, défendent la souveraineté nationale. Les citoyens eux-mêmes ont un rôle à jouer, en soutenant ces engagements et en se préparant à des temps plus incertains.
Le contexte actuel rappelle une évidence : la paix et la démocratie ne sont jamais définitivement gagnées. Elles reposent sur la volonté de ceux qui s’engagent, au détriment de leur tranquillité ou parfois au péril de leur vie. Dans une Europe qui vacille sous le poids des menaces, cet engagement est plus précieux que jamais.
Hugues SAURY
Le 16 mars 2025