La loi Duplomb, récemment votée au Parlement, était attendue avec impatience par le monde agricole. Elle répond à une demande claire, urgente, formulée par des professionnels qui n’en peuvent plus de la complexité croissante de leur métier. Trop souvent laissés seuls face à une avalanche de normes, d’obligations administratives et de contrôles contradictoires, les agriculteurs ont vu dans ce texte un premier signal de reconnaissance. Pourtant, cette loi qui autorise l’usage encadré de l’acétamipride, une substance utilisée par 26 des 27 pays de l’Union européenne, a donné lieu à une polémique aussi vive qu’excessive. Il ne s’agit pas de renier nos ambitions écologiques, mais de permettre aux exploitants de continuer à produire, pour un temps, dans des conditions économiquement viables, sans les accabler davantage. Cette loi ne fait que rétablir un équilibre que d’autres pays européens n’ont jamais rompu. Par ailleurs, elle simplifie, sans brader les exigences environnementales. Le monde agricole, au bord de la rupture, avait besoin de cette bouffée d’oxygène. Elle leur a été donnée, et c’est une bonne chose.
Dans le même temps, une autre loi d’importance a été adoptée en première lecture : la loi de programmation sur l’énergie. Elle aussi a suscité son lot de controverses, certains y voyant un retour en arrière ou un renoncement aux engagements écologiques. Il n’en est rien. Cette loi constitue au contraire un tournant essentiel pour redonner à la France sa souveraineté énergétique. Après les atermoiements du président Macron, elle relance la production d’énergie nucléaire, secteur dans lequel notre pays a toujours été à la pointe, et fixe des objectifs clairs et chiffrés. Elle prévoit la construction de nouveaux réacteurs EPR, ainsi que le développement des SMR (petits réacteurs modulaires), des technologies innovantes, moins coûteuses et plus adaptables. Elle réaffirme non seulement l’ambition, mais elle donne aussi les moyens d’accélérer concrètement la décarbonation de notre mode de vie. En parallèle, elle privilégie l’implantation des éoliennes sur le renouvellement de sites existants (repowering), plutôt que de multiplier de nouvelles installations contestées. C’est une loi pragmatique, équilibrée, qui assume la réalité : la transition énergétique ne se fera pas sans le nucléaire, si nous voulons une énergie à la fois décarbonée et stable. Là encore, le choix fait est celui de l’efficacité et de la cohérence.
Mais au-delà de ces deux textes importants et courageux, le véritable rendez-vous avec la responsabilité arrive. Le Premier ministre a annoncé, mardi 15 juillet, un plan d’économies qui devrait s’élever à 43,8 milliards d’euros. Un chiffre à la hauteur du défi. Car il n’est plus possible de continuer à vivre à crédit. Le déficit se creuse d’année en année, la dette atteint des niveaux insoutenables, non seulement pour les générations futures, mais déjà pour la France d’aujourd’hui. Chaque euro emprunté, chaque dépense non maîtrisée fragilise un peu plus notre souveraineté économique. Ces efforts, qui devront être reconduits plusieurs années durant, concerneront tous les niveaux de l’action publique. Aucun ministère, aucune strate territoriale, aucune politique publique ne pourra se soustraire à la rigueur budgétaire. Ce ne sera pas simple, il y aura des protestations, des incompréhensions, sans doute aussi des manifestations. Mais l’alternative est bien pire : une France mise sous tutelle, des marges de manœuvre réduites à néant, une spirale d’endettement incontrôlable. Préserver notre capacité à décider pour nous-mêmes suppose ce courage collectif. Aucune des pistes d’économie n’est bonne, mais toutes sont indispensables. La lucidité commande de prendre dès aujourd’hui les décisions qui éviteront le pire demain. Le remède peut sembler amer, mais la maladie, elle, serait mortelle.
Ces trois textes, dans des domaines aussi cruciaux que l’agriculture, l’énergie et les finances publiques, dessinent une ligne de force : celle de l’action déterminée, quitte à bousculer les habitudes et à affronter les résistances. Dans un monde de plus en plus instable, seule une nation capable de faire des choix clairs, de tenir sa trajectoire et de maîtriser ses dépenses pourra continuer à défendre son modèle social et ses valeurs, renforcer son armée, et, ce faisant, affirmer sa place dans le concert des nations.
Cependant, ces mesures, pour nécessaires qu’elles soient, ne sont que conjoncturelles. La France a surtout besoin de réformes structurelles, profondes et courageuses. Il faudra remettre à plat, sans tabou, système de retraites, politique sociale, modèle éducatif et sans doute aussi notre organisation territoriale. C’est à ce prix que le pays pourra véritablement se redresser, affronter l’avenir avec confiance et garantir à chacun une place dans une République forte et juste.
La clarté, la responsabilité et l’engagement : c’est ce cap qu’il faut désormais tenir et ce sera, je l’espère, la boussole du parlement, Assemblée nationale et Sénat, qui, en dernier ressort, se prononcera sur le budget de la France.
De la dissolution décidée par le président de la République en juin 2024 à la déclaration, ce mardi, du Premier ministre annonçant un plan d’économies inédit, une année difficile, marquée par des incertitudes, des tensions et des réformes profondes, vient de s’écouler. Dans ce contexte exigeant, chacun a dû faire preuve de résilience, de discernement et parfois de courage. Souhaitons que la période estivale qui s’ouvre offre à tous un temps de repos bien mérité, l’occasion de prendre du recul, de se ressourcer et de retrouver l’énergie pour aborder la rentrée avec optimisme.
C’est ce que Pauline Martin et moi-même vous souhaitons très sincèrement. Prenez soin de vous et de ceux que vous aimez, et passez d’excellentes vacances. Pour notre part, nous vous donnons rendez-vous en septembre avec la publication de notre bilan semestriel.
Hugues Saury
le 17 juillet 2025